Une grande dame de l’approche de Palo Alto vient de nous quitter.
Teresa Garcia a été l’un de nos « maitres » lors de notre initiation à la Thérapie Brève.
Avec Jean-Jacques Wittezaele et Claude Seron elle a fondé en 1987 l’Institut Gregory Bateson (IGB) de Liège qui fut représentant du Mental Research Institute de Palo Alto pour l’Europe Francophone.
Nous avons bénéficié de son enseignement à partir de 1993, quand l’IGB a commencé à organiser des formations en dehors de la Belgique, en France et en Suisse. A l’époque, Paul Watzlawick et Richard Fisch, deux des « inventeurs » de la méthode, ainsi que Karin Schlanger faisaient partie de formateurs.
Elle a écrit, avec Jean-Jacques Wittezaele, le remarquable : « A la recherche de l’Ecole de Palo Alto », ainsi qu’un article fondamental sur la méthode : « L’approche clinique de Palo Alto » dans le « Panorama des thérapie Familiales » dirigé par Mony Elkaïm.
Comment parler de Teresa ?
Elle était pétillante de vie et d’enthousiasme pour le modèle de Palo Alto. Elle l’enseignait avec une passion infatigable, nous impressionnait par sa clarté, sa finesse et par ses fulgurances lors des séances de thérapie.
Elle était en recherche constante de progression personnelle et d’amélioration de ses enseignements. Nous lui devons beaucoup, non seulement pour les connaissances qu’elle a transmises, mais aussi parce qu’elle a été une source d’inspiration et une partenaire de réflexion durant des années.
C’est grâce à elle que nous avons pu pour la première fois bénéficier, en novembre 2009, de l’enseignement de deux associées de recherche du Centre de Thérapie Brève du MRI de Palo Alto : Barbara Anger-Diaz (1939-2018) et sa fille Katarina Anger. Teresa, avait en effet organisé un séminaire avec ces deux remarquables thérapeutes dans le cadre du Centre d’Intervention et de Recherche sur le Changement et l’Évolution des systèmes humains (CIRCE) qu’elle avait créé. C’est aussi grâce à Tersa que notre association Paradoxes a pu organiser, en collaboration avec CIRCE, un nouveau séminaire avec Barbara et Katarina en 2011. (Leurs communications sont publiées sur notre site)
En 2010, Teresa était intervenue à la neuvième Journée de Rencontre de notre association sur le thème : « Concepts simples pour aborder la complexité des couples ». Elle n’a, à notre grand regret, pas publié son texte sur notre site.
Nous invitons tous ceux qui l’ont connue et qui souhaitent partager leurs souvenirs à laisser leur témoignage dans un commentaire ci-dessous.
Voir son Faire-part
La famille de Teresa invite tous ceux qui le souhaitent à participer au financement du dernier projet de Teresa: https://www.leetchi.com/c/teresa-garcia-rivera
I. BOUAZIZ, C. GAUDIN /©Paradoxes
Je viens de « découvrir » le décès de Teresa GARCIA. Ému et très attristé, par cette nouvelle. Mes condoléances profondes à ces proches. Je l’ai fréquenté au IGB au travers de ces formations.
Merci à son compagnon JJ Wittezaele, et ses efforts conjugués, pour construire et animer une « école » de formation à la Systémique. Je n’ai plus de nouvelle depuis des années !
Belle époque de ma vie pendant laquelle, je découvrais aussi, en cher et en os, quelques acteurs majeurs de ce modèle (P Watzalavic, Dick Fisch, G Nardonne,…) grâce à eux deux.
La vie, tel un bateau, nous mène en notre destinée, bâtie aussi par (l’incertitude de) nos volontés.
Je prie pour Teresa, et au travers de ce passage bénéfique, et Espère en cette Vie de l’Au-delà. Jacques.
Paris, Automne 2001, IGB MRI de Liège à Paris. Première année de l’intervention systémique.
Après deux ans de formation à l’Hypnose Ericksonnienne (IMHEDP) où j’entends parler de la systémique, il est naturel d’explorer l’approche pragmatique de Palo-Alto. Un couple d’amis thérapeutes, Jean Pierre et Catherine, que j’estime beaucoup, vient de terminer, avec enchantement, la formation à l’IGB. Ils m’en parlent avec tellement d’enthousiasme que je m’y inscris immédiatement. Ouf, il reste de la place. Nous sommes vraiment nombreux dans la salle et pratiquement tous venus du champ médico-social.
Dès le deuxième jour de la formation, le 18/11/2001 une petite femme, cheveux bruns et bouclés, avec un accent dont je ne savais encore déterminer la provenance, fait son apparition : Teresa Garcia. Elle nous présente ses recherches sur la communication thérapeutique, l’hypnose dont langage d’influence impacte tant les comportements, son travail avec les couples… Je ne comprends pas encore grand chose de la systémique mais cette femme me marque par la concomitance de son excellence et de son humilité ….
Teresa nous partage ingénieusement le modèle de la thérapie brève, les notions de vision interactionnelle, de causalité circulaire et du feed-back, la cybernétique de second ordre qui intègre d’emblée l’influence de l’intervenant sur le système.
En deuxième année, il est de coutume d’assister aux thérapies filmées en direct à l’IGB. Nous (les stagiaires) sommes dans une pièce au rez-de-chaussée, équipée de la TV. A l’étage, dans le bureau équipé d’une caméra, Teresa reçoit les parents désespérés d’une adolescente. Leur fille, prise au piège de l’anorexie, ne pèse que 45kg et refuse une nouvelle hospitalisation, seul espoir de lui sauver la vie. Dans notre salle nous captons immédiatement la gravité de la situation : elle risque de mourir et ses parents se sentent impuissants. L’attitude compatissante de Teresa me saisit. Dès les premières secondes de l’entretien l’air se remplit de respect, d’humilité et de sa voix à la fois empathique, naïve et questionnante… Voix qui emplit à la fois son bureau et notre salle malgré les murs épais qui nous séparent.
J’ai à nouveau cette sensation de la première fois où j’ai vu Teresa : tellement présente et tellement invisible en même temps… Comme si son corps se dissipait dans la pièce… Comme s’il ne restait que la pertinence et la fluidité stratégique portée par sa voix. Virtuose de l’hypnose conversationnelle, ses paroles bercent tout l’environnement et font évoluer la situation. Délicatesse de la danse relationnelle, élégance du geste… Les visages des parents changent… Leur attitude se modifie…
Je suis touchée par cette manière à la fois simple et sophistiquée qu’a Teresa de présenter la tâche paradoxale aux parents… Cela paraît tellement naturel… logique et respectueux de tous, que les parents l’ont rapidement fait leur et, réconfortés, partent apaisés.
Nous restons sans voix. Danielle Janin dira alors de Teresa: « c’est une fée ». Nous ne savions pas vraiment nommer ce que Teresa faisait mais nous sentions la magie opérer… Nous sommes restés bouche bée jusqu’à ce qu’elle nous rejoigne et commente ce qui s’était passé. Elle démystifie le mystère de la thérapie… décrypte rigoureusement ce qui a été fait… Ce jour là je me suis dit que c’est LA voie que je choisis.
Nous nous croisons à nouveau au Congrès « 20 ans de la double contrainte » où Teresa apparaît plus présente que jamais et toujours avec cette petite voix rayonnante d’humilité.
Voix qui me marque à nouveau quand je décide de la consulter… troisième séance : un recadrage marque ma vie et permet de faire évoluer totalement ma perception de la situation. Avoir traversé avec elle l’intervention systémique de l’intérieur me conforte alors dans l’idée que le chemin est la destination. Je poursuis encore et sans fin, au rang de l’Ecole du Paradoxe.
Ensuite nous nous voyons plus souvent, passons à un autre niveau de la relation et de la collaboration.
Tes articles et livres, ton cheminement du monde de la thérapie vers celui des organisations aboutissent à ta thèse, résultat d’un chemin d’incessante curiosité, de conceptualisations sans cesse renouvelées, entremêlées de respect et de cette humilité qui t’est si singulière.
Merci Teresa d’avoir contribué à améliorer le monde, d’avoir contribué à développer la recherche dans le domaine de la thérapie mais aussi, plus largement dans celui de relations humaines, de l’entreprise et des organisations.
Je te garde dans mes pensées, mon cœur, mes réseaux de neurones que tu as contribué à déployer.
Merci pour ta confiance, nos échanges, ta spontanéité, ta réciprocité, ta beauté… et surtout de ce je ne sais quoi qui se répand dans l’air quand tu passes par là… un mystère doux et bienfaisant. Merci d’être restée aussi aimante, reliante et bienveillante … jusqu’au bout.
Affectueusement et avec ma profonde gratitude…
Aleksandra Kosinska
Chère Teresa,
Je voulais te remercier infiniment.
Évidemment, durant mes années d’apprentissage à l’IGB, pour tout ce que tu m’as appris, transmis, pour tout ce que j’ai vu de tes interventions auprès des stagiaires, des patients, pour tous tes commentaires constructifs sur mes débuts chaotiques.
Mais aussi, pour ton sourire solaire, ta joie rayonnante, ton charmant accent si tonique …
Enfin, puisque je n’en ai pas eu l’occasion, un grand merci pour ton dernier texto, incroyablement doux.
Pour tout cela, encore, merci.
François.
Les personnes que l’on a beaucoup aimées restent à jamais dans notre cœur. J’ai rencontré Teresa au MRI de Palo Alto en 1983. Nous avons vécu 18 ans ensemble, fondé le Centre de Thérapie Brève de Mexico, avant de fonder l’IGB avec Claude Seron. Ces années ont été fabuleuses pour moi, et même si les aléas de la vie nous ont séparés, j’ai l’impression aujourd’hui d’avoir été amputé d’une partie essentielle de mon existence. Elle était pétillante, créative, et sa compassion en faisait une thérapeute hors du commun. La douleur de sa perte est immense et je vous remercie, chères Irène et Chantal, d’honorer ainsi sa mémoire.
Teresa’ avec JJW ont été ceux qui m’ont formé à l’APA dans les années 90. Elle l’a fait avec bienveillance et autorité.
Je me souviens encore de la semaine en Corse qui m’a tant marqué avec cette atmosphère de travail et de convivialité.
Pensées pour cette grande dame partie trop tôt
une grande dame !
une des premières à savoir partager son expérience, ses recherches,ses travaux incessants avec humilité
un grand merci pour ces bons moments passés ensembles …
Pensées émues pour Teresa dont j’ai pu mesurer et partager la profonde empathie à nous guider et la patience bienveillante à transmettre les fondements de sa pratique ;
Dominique Grossi – Limoges
Je n’ai pas eu la chance d’interagir directement avec Teresa. J’ai assisté à l’une de ses interventions dans le cadre de la promotion du livre collectif « Faire réussir les acteurs clés de l’entreprise avec les interventions brèves ». J’avais été frappé par la stratégie qui conduisait ses interventions. Je m’étais inscrit non pas à Circé, mais à l’IGB tout de suite après…
J’ai aussi lu ses écrits et eu l’occasion de suivre ses feedbacks dans le cadre de webinaires LACT. J’étais impressionné par sa curiosité et son enthousiasme. La nouvelle de sa disparition l’a touché et je compatis avec tous ceux qui l’ont connue et sont affectés.
Merci pour ce bel article sur Teresa, je l’y retrouve bien. Elle m’avait donné la liberté en m’aidant à dissocier le modèle des outils… Je l’ai connue à l’IGB à Liège, Paris et Propriano…en 2005,2006,2007… à la fin de ses années IGB. Une belle personnes pétillante et passionnée par son métier. Un bel exemple… Une belle personne…